Querido Amancio, organisée à l’occasion de notre nouveau fonds Amancio Williams, a donné lieu à une lecture publique de lettres personnelles, au cours de laquelle les participants - Emilio Ambasz, Florencia Álvarez, Giovanna Borasi, Fernando Diez, Kenneth Frampton, Mario Gandelsonas, Juan Herreros, Martin Huberman, Cayetana Mercé, Inés Moisset, Ciro Najle, Ana Rascovsky, Claudio Vekstein et Claudio Williams - ont commenté l’héritage d’Amancio Williams.

Fernando Diez a fait part de ce qui suit :


Je ne peux adresser cette lettre qu’à l’esprit d’Amancio Williams, une image incertaine que j’ai construite petit à petit, grâce aux références de ceux qui l’ont connu.

« C’est le comble! », lance Amancio à Alfonso Corona Martínez dans la vieille librairie Concentra de la rue Viamonte, en observant le livre nouvellement arrivé qui comportait les premières images de la chapelle Notre-Dame du Haut, par laquelle le Corbusier avait déjoué toutes les attentes. Corona Martínez, qui avait travaillé dans sa jeunesse à l’étude de Williams, m’a d’ailleurs déjà dit en mode révélation : « Pour Amancio, il s’est toujours agi de dessiner et de redessiner ».

J’en ai appris un peu plus grâce au travail ardu et remarqué de Claudio Vekstein, lorsqu’il a reconstruit deux « voûtes pelure » (bóvedas-cáscara) sur la côte de Vicente López, osant ainsi un compromis structurel entre l’audace du passé et la certitude contemporaine. C’est également l’expression de la difficulté intrinsèque qu’a la construction à atteindre la perfection du dessin, et d’un idéal qui, de par sa nature propre, doit constamment se manifester en tension avec le possible.

Si l’idéal signifie d’une quelconque manière l’impossible, on peut supposer qu’Amancio Williams l’a atteint. Ses œuvres non-construites expriment le rêve d’un ordre, d’une organisation capable de vaincre le désordre d’un univers chaotique. Mais ce qui donne un sens à un idéal c’est surtout, outre son immatérialité et sa vertu, son humanité : la volonté de conjurer le temps et l’espace dans l’illusion de l’universel et de l’impérissable. En ce sens, je crois que Williams a montré qu’il était trop idéaliste et trop humain.

Cet excès a néanmoins porté ses fruits. Ironiquement, l’œuvre immatérielle, dessinée, qui nous réunit présentement, est aussi une œuvre concrète dont la conservation matérielle exige des soins méticuleux.

Mon image d’Amancio Williams a pris forme grâce à ma collaboration avec Claudio Williams, lorsque nous avons édité le livre Amancio Williams avec l’approbation de Summa+ : un document qui présente dans un format pratique l’œuvre d’Amancio Williams, dont la meilleure expression demeure le fonds d’archives. Un livre fidèle aux souhaits et à l’esprit d’Amancio, quand on considère sa forme et son contenu.

J’ai rencontré à nouveau les Williams lors de Latin America in Construction au MoMA à New York, une exposition consacrée, justement, aux utopies et aux villes idéales, où on a accordé une grande importance aux dessins d’Amancio.

C’est à travers ces expériences, parmi d’autres, que j’ai pu constater l’engagement persistant et loyal de Claudio Williams et de sa famille, non seulement envers la conservation du legs de son père, mais aussi sa mise en valeur, afin de le faire connaître et de le mettre à la disposition des chercheurs et des étudiants. Ce qu’il convient également de souligner, c’est qu’il a toujours préservé l’unité de l’œuvre, en ne cédant jamais à la tentation d’en détacher les pièces les plus attrayantes lorgnées par les musées.

J’ai rencontré à nouveau Amancio Williams à la présentation de la thèse de doctorat que Luis Müller a défendue à la Universidad Nacional de Rosario, où j’ai eu l’occasion de découvrir sa correspondance, l’intimité de ses désirs et tribulations, ainsi que les frustrations à voir le réel s’imposer au détriment de l’idéal.

Nous avons publié dans Summa+ 171 un chapitre de la thèse de Müller, illustrée de documents inédits et de plans techniques rares, tous généreusement cédés par le fonds d’archives Williams, tout comme les images illustrant l’article analytique approfondi que vient de publier Summa+ 176 sous la plume de Roberto Fernández. Aujourd’hui s’amorce une nouvelle relation avec le fonds d’archives Williams, dont nous espérons qu’elle sera tout aussi fructueuse.

Personnellement, je m’attriste du fait que les archives n’aient pu être accueillies par une institution argentine qui puisse garantir leur conservation adéquate. Ce qui me réconforte, toutefois, c’est que, bien qu’à l’extérieur du pays, une institution comme le Centre Canadien d’Architecture, dont la rigueur et le prestige m’inspirent la plus grande confiance, puisse les accueillir.

Pour nous, Argentins, s’amorcent une réflexion et une discussion nécessaires sur l’attention portée à notre patrimoine documentaire et artistique. La décolonisation de l’histoire de l’architecture se déplace dans différentes directions, de sorte que ce qui d’un côté paraîtra inévitablement comme une défaite, ouvrira de l’autre la possibilité de l’incorporation du fonds d’archives Amancio Williams au circuit universitaire et culturel de l’hémisphère nord anglophone. Cela permet également d’entamer le dépassement d’une histoire de l’architecture résolument eurocentrique, donnant ainsi à Amancio Williams, une des grandes figures de l’architecture du XXe siècle, un aspect prémonitoire.

Quoi qu’il en soit – je crois que l’esprit d’Amancio Williams acquiescera plus que jamais – nul n’est prophète en son pays et son fonds d’archives se trouvera maintenant en de meilleures conditions pour favoriser la reconnaissance et la diffusion de son œuvre.

Ô esprit d’Amancio Williams, je crois que nous sommes devenus amis.

Bon voyage !

Fernando Diez
Buenos Aires, 11 mars 2020

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