Frances Richard est chercheure en résidence au CCA et professeure associée au Barnard College. Elle met en perspective les jeux de mots de Gordon Matta Clark et de Marcel Duchamp par le biais d’un « renvoi miroirique »:

Reconnu pour avoir découpé des bâtiments abandonnés et en avoir fait des environnements sculpturaux, Gordon Matta-Clark (1943-1978) est généralement considéré comme un « tool-belt conceptualist », ayant déjà déclaré qu’il était incapable de réfléchir au sein d’une situation idéale et qu’il « utiliserait bien vite un marteau-piqueur ». Pourtant, les interviews, les textes et les notes de Matta-Clark révèlent un penseur perspicace et joueur dont les jeux de mots, les fragments poétiques et les néologismes imposent à la langue le même genre de bouleversements audacieux qu’il crée dans l’environnement construit. Marcel Duchamp (1887-1968) occupe une place dans l’imaginaire de l’histoire de l’art qui est, dans un sens, à l’exact opposé de celle de Matta-Clark, en tant qu’artiste qui proclamait la primauté des idées et de la matière grise sur l’objet. Bien évidemment, Duchamp aussi était un maître réputé du calembour, de l’aphorisme et de la nomenclature sui generis.

Ce séminaire juxtapose ainsi trois paires de termes inventés – trois de chaque artiste – à l’aide desquels Matta-Clark et Duchamp ont défini leurs oppositions aux pratiques créatives traditionnelles, nommé leurs appropriations d’objets appartenant au non-art et exploré leurs fascinations pour des espaces imperceptibles ou inaccessibles. La correspondance de ces termes – anartiste et anarchitecture, readymade et ready-to-be-unmade, inframince et the thin edge – ne prouve pas irréfutablement une influence de Duchamp dans l’œuvre de Matta-Clark. Plutôt, cela représente ce que Duchamp appelait un renvoi miroirique, une répétition inversée et par conséquent altérée.

Frances Richard est critique d’art et poète. Ses critiques paraissent, entre autres, dans les revues Artforum, The Nation et The London Review of Books, ainsi que dans des catalogues d’expositions produites par des institutions incluant le Musée Guggenheim et le Whitney Museum of American Art. En 2005, avec Jeffrey Kastner et Sina Najafi, elle a organisé l’exposition Odd Lots: Revisiting Gordon Matta-Clark’s “Fake Estates” et une monographie du même nom. Une extension de ce projet est présentement en cours et a reçu le Arts Writers Grant du Creative Capital/The Warhol Foundation. Un volume de poèmes, See Through, a été publié par Four Way Books en 2003; un deuxième livre, Plummet, paraîtra en 2011 chez Les Figues Press. Frances Richard a été membre des équipes éditoriales de la revue Cabinet et du journal littéraire Fence. Elle enseigne au Barnard College et au Rhode Island School of Design.

Frances Richard était chercheure en résidence au CCA en 2010.