Aujourd’hui, après des décennies de remise en cause de l’aptitude des sciences à fournir des réponses au mandat social de l’architecture, le concept de laboratoire captive de nouveau les architectes et les designers. Le laboratoire, conçu à l’origine comme l’espace physique dédié à la pratique de l’alchimie, puis cristallisé sous sa forme actuelle durant les Lumières, est devenu un terme omniprésent dans l’enseignement, la pratique et la théorie de l’architecture. Les écoles d’architecture, les entreprises privées et les groupes de réflexion gouvernementaux sont de nouveau saturés de « laboratoires de création » qui promettent tous d’apporter des solutions objectives et précises aux enjeux du design contemporain. L’omniprésence que lui vaut son statut de métaphore, d’espace physique et d’esthétique visuelle a fait du laboratoire un dogme irréfutable. Au moment où la science et la production du savoir scientifique sont une fois de plus la cible d’attaques, la confiance de l’architecture en l’infaillibilité de la science ressemble paradoxalement à la dévotion aveugle d’un culte religieux.

Au lieu de renforcer des présuppositions de hiérarchies entre la science et de l’architecture, Culte du labo explore une situation plus symétrique. Juxtaposant de manière éclectique des études de cas tirées de ces deux domaines, cette exposition révèle une histoire de relations étroites et d’échanges réciproques. Les architectes sont souvent accusés d’emprunter, de transformer et même de détourner des idées, des instruments et des protocoles de travail scientifiques dans leur tentative de systématiser les aspects intuitifs du processus créatif. Pourtant, on voit en même temps que les scientifiques dépendent fortement de concepts, de représentations et de moyens matériels propres à l’architecture pour mettre en scène et faire connaître les assemblages complexes d’une étude rigoureuse.

L’exposition s’articule autour de six thèmes : « Conception des instruments», « Mesure du mouvement», « Visualisation des forces », « Expérimentation avec les animaux », « Construction de maquettes » et « Observation du comportement ». La présentation de chacun des thèmes se fait selon le principe du jumelage d’une étude de cas historique du domaine de la science avec une étude de cas en architecture. Datant de la fin du XIX^e siècle au début des années 1980, ces études de cas identifient les diverses manières dont les concepts, les méthodes et les protocoles ont circulé, à travers différentes époques, entre les scientifiques et les architectes venant d’horizons disciplinaires aussi divers que l’architecture, la psychologie, l’ingénierie, la physiologie, les mathématiques, le design industriel et la science informatique entre autres.

Commissaire : Evangelos Kotsioris, Commissaire émergent 2016–2017
Graphisme : Louise Paradis, Montréal
Dessins : New Affiliates, New York