Néanmoins, ils gardent espoir

Traces de contestations est désormais exposée dans nos vitrines . Image : Alessandro Poli, Paesaggio lunare, Architecture interplanétaire, 1973. ARCH280688. CCA

Traces de contestations

Irene Chin, Auden Young Tura, Lisa Belabed, Laura Aparicio Llorente et Megan Marin montrent comment les architectes s’engagent dans les crises de leur temps

L’architecture est une discipline politique. Alors que les bâtiments établissent les relations sociales et réifient les dynamiques de pouvoir, les architectes possèdent la capacité de pérenniser les systèmes de valeurs hégémoniques ou proposer des ordres nouveaux. À la lumière des défis auxquels les architectes sont confrontés aujourd’hui en raison de la crise écologique (voir notre série en cours Sur le terrain), une sélection de documents de la collection du CCA présentés dans Traces de contestations montre comment les architectes dans le passé se sont impliqués dans les crises de leur temps. Cet article présente quelques-uns de ces documents afin de mettre en évidence la manière dont les différents formats de publication ont véhiculé les discussions en cours et l’évolution des questions au fil du temps.

Les périodiques sont des outils importants pour la diffusion d’idées et la création de communautés, offrant des plateformes pour l’agonisme et le débat. Révélant des positions alternatives et une opposition populaire face aux forces dominantes telles que le capitalisme, l’oppression et la guerre, ces périodiques révèlent le pouvoir que peut avoir l’architecture dans le façonnement de la société.

ARSE

Couverture de ARSE : architectural radicals, students & educators, no.5&6 numéro double, printemps / été 1972.

ARSE : architectural radicals, students & educators, no.5&6 double issue, printemps / été 1972.

À la fin des années 1960, un groupe d’étudiants, de professeurs et de praticiens de l’Architectural Association forment un collectif dont l’action est guidée par une compréhension commune de la responsabilité de l’architecte, et qui s’oppose aux structures de pouvoir hégémoniques. Ils sont animés par le besoin d’un changement radical dans l’organisation du monde et par leur volonté de concrétiser de nouvelles idées pour une société où chacun pourrait s’épanouir.

Outre leurs actions directes, ils publient une revue, provisoirement nommée ARSE – pour « Architects’ Revolutionary Socialist Enclave or whatever you want to call it » [Enclave socialiste révolutionnaire des architectes ou tout autre nom que vous voulez lui donner] ou encore « Architects for a Really Socialist Environment » [Architectes pour un environnement véritablement socialiste] –, destinée à être diffusée dans les écoles d’architecture. Cette revue cherche à avoir un large rayonnement et à créer des discussions autour des problèmes dans l’environnement bâti, en se penchant sur des enjeux comme la place de la technocratie au sein de la discipline, les combats pour l’accès au logement et l’omniprésence du Royal Institute of British Architects (RIBA) dans la formation des architectes. Dans le contexte du mouvement étudiant de mai 1968, le collectif s’engage à traiter l’architecture comme étant un agent actif du tissu social et à contrôler l’impact de sa pratique architecturale dans une société capitaliste.

Les pièces de notre collection traitant des multiples actions d’ARSE nous donnent un aperçu de la conscience politique des étudiants à l’ère du néolibéralisme postmoderne, où l’architecture joue un rôle de plus en plus important en tant qu’instrument étatique, technocratique et militaire. Ces zines sont un véhicule politique au design conceptuel et créatif, qui communique les luttes collectives d’une manière accessible. Ils nous permettent de mettre ces luttes passées en perspective avec les mouvements étudiants contemporains dans les écoles d’architecture, face à la violence systémique, ainsi qu’avec la place qu’occupent les pratiques architecturales dans le maintien et la mitigation des systèmes d’oppression.

ARSE : architectural radicals, students & educators, no.5&6 numéro double, printemps / été 1972.

ARSE : architectural radicals, students & educators, no.5&6 numéro double, printemps / été 1972.

Alessandro Poli et Quindici

Alessandro Poli, Collage avec notes pour Zeno, une cultura autosufficiente [Zeno, une culture autosuffisante], 1972-1980. ARCH400275. Fonds Alessandro Poli, CCA © Alessandro Poli

Le premier alunissage d’êtres humains, le 20 juillet 1969, a profondément inspiré Alessandro Poli, membre de Superstudio. Poli s’intéresse au rôle des médias de masse dans la mythification du voyage spatial et crée des collages avec des coupures de journaux et de revues, pour imaginer une architecture extraterrestre. Ses collages témoignent de son intérêt à repenser les pratiques agricoles dans le contexte de la conquête lunaire et montrent comment la « super technologie » est susceptible d’éloigner les humains de tâches élémentaires, comme cuisiner.

Pour certains, l’alunissage est considéré comme une avancée technologique importante, mais d’autres sont critiques de l’allocation de fonds gouvernementaux accordés à ces projets, au détriment d’actions contre la pauvreté et de l’amélioration des systèmes agraires. Immédiatement après l’alunissage, le « Circolo operaio » (Cercle des travailleurs) a publié un manifeste in Quindici, se demandent si l’objectif des missions spatiales américaines et russes n’est pas de servir avant tout les intérêts capitalistes et de renforcer la paupérisation de la classe ouvrière. Si Poli perçoit l’aventure lunaire comme un événement catalyseur pour l’architecture, amenant un langage conceptuel entièrement nouveau, ses collages et le fait qu’il ait retenu cette publication indiquent qu’il est conscient des dangers possibles d’une croyance aveugle dans les nouvelles technologies.

Couverture de « Quindici » (extrait du dossier du projet Architettura Interplanetaria [Architecture interplanétaire]), août, 1969. ARCH400145. Fonds du Alessandro Poli, CCA. Don de Alessandro Poli

Affiche du manifeste des travailleurs en réponse à l’alunissage dans « Quindici », Circolo Raniero Panzieri, Porto Marghera, août 1969 (extrait du dossier du projet Architettura Interplanetaria [Architecture interplanétaire]). ARCH400145. Fonds du Alessandro Poli, CCA. Don de Alessandro Poli

Čovjek i prostor

Affiche de protestation des architectes dans Čovjek i prostor, 1992.

La Guerre pour l’indépendance de la Croatie entraine le déplacement de plus de 400 000 personnes ainsi que la destruction de 15 % de toutes les habitations – soit plus de 180 000 bâtiments – du pays. Cela modifie radicalement l’environnement bâti de la nation. Au cours des quatre années de guerre effective (1991–1995), la revue d’architecture Čovjek i prostor, qui n’avait jamais abordé explicitement de telles questions politiques auparavant, tourne entièrement son attention vers le déplacement de la population croate et la destruction des édifices historiques. Certains numéros spéciaux sont consacrés à une ville en particulier, comme celui de janvier 1992, qui a pour sujet Vukovar, théâtre de l’une des plus importantes batailles pour l’indépendance croate et qui sera massivement bombardée. D’autres numéros, dont celui de décembre 1991, mènent une enquête sur des villes plus petites, partiellement ou entièrement détruites.

Durant cette période, Čovjek i prostor collecte les signatures de nombreux architectes croates choqués par la dévastation, et les rassemble sur une affiche accompagnant les numéros de 1991 et 1992. Toutes les éditions de la revue publiées entre 1991 à 1995 sont rédigées en croate et en anglais, ce qui assure une visibilité internationale au conflit et à ses impacts sur le patrimoine bâti. Bien que le langage visuel utilisé dans ces numéros spéciaux cherche à refléter les atrocités de la guerre, le contenu de la revue reste néanmoins porteur d’espoir, proposant des solutions de reconstruction et de protection des bâtiments encore debout tout en préservant la mémoire de ceux qui ont été détruits pendant les hostilités.

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