Des métaphores pour le Nil
Samaa Elimam retrace les lectures du plus long fleuve du monde
Dans les années 1960, les écolières et écoliers en Égypte apprenaient à reconnaître la vallée du Nil comme une fleur de lotus, dont les tiges prenaient racine dans les affluents du Soudan et les pétales s’épanouissaient dans le delta égyptien1. Cette image romantique refoulait une longue histoire, rythmée par les conflits autour des eaux nilotiques, qui se poursuit encore aujourd’hui. Tout au long du XXe siècle, les historiens, les ingénieurs et les politiciens ont eu recours à une série de métaphores du Nil pour justifier les mesures coloniales et nationalistes relatives à la gestion du fleuve. Comment ces métaphores techniques, corporelles et botaniques ont-elles contribué à naturaliser la conquête du fleuve au cours de cette période, en occultant les relations impériales tendues entre l’Égypte et le Soudan? Qui jouit du pouvoir de comparer et d’assimiler? Comment les effets durables de ces figures spectrales continuent-ils à hanter les conflits géopolitiques qui éclatent actuellement dans la région?
Notre manière de décrire nos environnements témoigne de nos présomptions et simultanément prépare le terrain pour leur construction. À bien des égards, la description d’un territoire exprimé en mots et en images est une forme de topographie. Dans le cas de la vallée du Nil, la carte et la métaphore ont été des instruments de représentation essentiels à la revendication du pouvoir sur le territoire. Elles reposent sur le principe que si le fleuve peut s’apparenter à un objet extérieur à lui, alors il peut aussi être manipulé comme cet objet. Les métaphores géographiques en particulier adoptent une vue d’en haut, réduisant instantanément une vaste région fluviale transnationale en un symbole, qui permet de simplifier et d’abstraire la géopolitique.
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Selon ma mère, Azza Kandil, qui a fréquenté l’école primaire du Caire de 1960 à 1996. ↩
Les métaphores révèlent des visions du monde. Au cours de son passé chargé d’histoire, la vallée du Nil a inspiré une multitude de comparaisons poétiques. Les cosmogrammes antiques et les cartes médiévales illustraient son parcours sinueux, contemplaient son apparente infinité et spéculaient sur sa source mystérieuse. Le Nil occupe le centre du monde dans sa représentation circulaire réalisée par le cartographe arabe Muhammad al-Idrisi. Alors qu’Hérodote remarquait l’hydrologie particulière du Nil, qui s’écoule « à l’envers » par rapport aux fleuves grecs, dans la tradition cartographique musulmane, il s’écoule du haut vers le bas de la page1.
Le géographe du IXe siècle Muḥammad ibn Mūsā al-Khwārizm a représenté les méandres du Nil en les étirant horizontalement sur la page d’un folio manuscrit2. Tandis que l’embouchure du fleuve se jette dans une mer Méditerranée rectangulaire à gauche, sa source supposée se cache dans les mythiques Montagnes de la Lune à droite [fig. 1]. La rivière traverse la page suivant le sens de l’écriture arabe. S’étendant sur trois climats antiques, traversant six cataractes et passant par la ligne de l’équateur, le parcours sinueux du Nil est constellé de sites remarquables et de petites villes. Qu’elles soient orientées vers le nord ou le sud, les descriptions antiques et médiévales du Nil formaient le noyau d’une cosmologie terrestre.
Mais à l’époque moderne, les puissances coloniales qui se disputaient le contrôle du Nil Supérieur adoptèrent de nouvelles images, particulièrement violentes. Au cours du XIXe siècle, le vice-roi ottoman d’Égypte, Méhémet Ali Pasha (r. 1805-1848) et sa dynastie, soumettèrent le paysage du Nil à un ambitieux projet de modernisation. En vue d’étendre ses limites territoriales vers la frontière sud, la vice-royauté entrepris en 1821 une invasion du Soudan qui durera six décennies. Ces événements marquèrent le début d’une série d’incursions égyptiennes au Soudan qui se poursuivront jusqu’au XXe siècle et viendront compliquer les relations entre les pays nilotiques jusqu’à ce jour. Cette campagne inaugura également une nouvelle ère de représentations textuelles et verbales du fleuve qui traverse ces nations, fondée sur « l’unité de la vallée du Nil »3.
Les métaphores colonisent. En 1882, les Britanniques occupaient une Égypte lourdement endettée après la construction du canal de Suez. Au fil des années, ils développèrent une vision géopolitique stratégique pour le Nil, soulignant la dépendance de l’Égypte vis-à-vis de ses voisins en amont pour son approvisionnement en eau douce. La perspective d’un Soudan indépendant est mise à profit pour faire pression sur l’Égypte et, en 1896, s’amorce la guerre anglo-égyptienne au Soudan.
Le récit en deux volumes de Winston Churchill, The River War [La Guerre du fleuve] [fig. 2], relate les événements de cette conquête commune. L’image introductive évoque une certaine vision de l’hégémonie britannique sur la vallée du Nil : « Le Soudan est rattaché à l’Égypte par le Nil comme un scaphandrier est relié à la surface grâce à son tuyau d’air : sans lui, c’est la suffocation »4. Il ne s’agissait pas seulement de l’image sadique d’un homme d’État inquiet de la perte éventuelle de territoires au profit d’adversaires français. Elle a plutôt fait office d’une métaphore fondatrice de la politique coloniale britannique en Afrique de l’Est au cours du demi-siècle suivant. En dressant l’Égypte et le Soudan l’un contre l’autre, la politique britannique du « diviser pour mieux régner » rendait légitime la poursuite de son intervention dans la vallée du Nil. Curieusement, la métaphore de Churchill transposait une nécessité pour une autre – l’eau pour l’air. Alors que la pénurie d’eau représentait la véritable menace, celle de mourir de soif, la sienne était une image d’inondation, celle de la mort par noyade.
Le conflit a abouti au condominium anglo-égyptien de 1899, un accord conjoint sur « l’administration future du Soudan ». Sa stratégie rhétorique rétablit la domination ottomano-égyptienne du XIXe siècle, en qualifiant la colonisation du Soudan de « reconquête » britannique des territoires « temporairement perdus par l’Égypte », résultat de « l’action concertée des deux gouvernements »5. Cependant, loin d’être une simple rhétorique, la reconquête du Soudan reposait en grande partie sur le sacrifice de troupes égyptiennes, y compris de troupes soudanaises, tandis que les drapeaux britannique et égyptien sont hissés côte à côte sur le Nil Supérieur.
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Lorraine Daston, Against Nature, MIT Press, Cambridge, 2019, 15. Un article récent traitant du conflit relatif au barrage de la Renaissance sur le Nil représente la carte du sud au nord en suivant le cours du fleuve. Max Bearak et Sudarsan Raghavan, « Africa’s largest dam powers dreams of prosperity in Ethiopia — and fears of hunger in Egypt », Washington Post, 15 octobre 2020. ↩
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Muhammad ibn Musa al-Khwarizmi, Kitab Surat al-Ard [Configuration de la Terre], c. 850. ↩
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Eve Troutt Powell, A Different Shade of Colonialism: Egypt, Great Britain, and the Mastery of the Sudan (Berkeley: University of California Press, 2003), 7. ↩
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Winston Churchill et Francis William Rhodes, The River War: An Historical Account of the Reconquest of the Soudan, vol. I, Longmans, Green and Co., New York, 1899. [La Guerre du fleuve : un récit de la reconquête du Soudan, traduction de l’anglais par John Le Terrier, Les belles lettres, Paris, 2015.] ↩
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« Appendix E: Agreement Between Her Britannic Majesty’s Government and the Government of His Highness the Khedive of Egypt, relative to the Future Administration of the Soudan » dans Churchill, The River War, 486-487. ↩
Les métaphores gouvernent. Au moment de l’indépendance de l’Égypte vis-à-vis de la Grande-Bretagne en 1922, l’image d’une vallée du Nil unifiée, cette fois-ci contre les Britanniques, s’impose. Un traité anglo-égyptien signé en 1929 reconnaît les « droits naturels et historiques de l’Égypte sur les eaux du Nil » et lui permet de mettre son veto à tout projet d’ingénierie en amont qui porterait atteinte à ces droits. S’en tenant aux termes du condominium, la Grande-Bretagne évince l’Égypte hors du territoire soudanais et maintient sa présence dans la région malgré le mécontentement de l’Égypte. En 1951, Farouk, le roi d’Égypte, abroge les termes de l’accord et déclare les deux pays légalement unifiés sous son autorité souveraine en tant que « Royaume d’Égypte et du Soudan ». Les références à l’ancienne « unité de la vallée du Nil » ont dominé la propagande de ce mouvement, visible sur un timbre conçu et surchargé, pour commémorer l’unification [fig. 3]. Ces images ont permis d’ancrer la souveraineté dans la géographie.
Un an plus tard, alors que les officiers libres d’Égypte déclenchèrent une révolution pour renverser le roi, le nouveau gouvernement dirigé par Mohammed Naguib et Gamal Abdel Nasser se positionne en faveur de l’indépendance du Soudan1. Les historiens nationalistes de l’Égypte déplorent cette perte, soutenant que « le Soudan est le prolongement naturel de l’Égypte »3. Invoquant l’autorité morale de la nature, ces spécialistes comparent le Nil à un palmier, incapable de porter des fruits sans ses racines méridionales3. L’un des principaux historiens égyptiens du Soudan, Mohammed Fu’ad Shukri, est alors sollicité pour la rédaction d’un discours que le Premier ministre égyptien Mahmud al-Nukrashi Pasha devait prononcer devant le Conseil de sécurité des Nations unies en 1947 pour justifier la revendication de l’Égypte sur le Soudan4. Dans son texte, il développe la même image du palmier dattier pour justifier la poursuite de la colonisation.
Les ingénieurs nationalistes suivirent. Ayant tout récemment fondé le Syndicat des ingénieurs égyptiens et lancé un journal bimensuel, Majallat al-Muhandisīn, leurs nouvelles formes de professionnalisation contribuent à une démonstration effrontée de nationalisme collectif. L’édition de 1947 inclut une série de textes consacrés à « l’unité de la vallée du Nil » [fig. 4]. Parmi les articles sur les projets d’infrastructure communs et les avantages économiques de l’unification, le Nil se trouve anthropomorphisé. « La vallée », écrivent-ils, « à l’instar du corps humain, faiblit et se détériore si toutes ses parties ne travaillent pas à l’unisson »5. Les ingénieurs assimilent le fleuve à un être humain, dont le corps obéissant du sud périrait sans la direction de son esprit du nord6. En d’autres termes, la séparation d’une partie de la vallée de l’autre entraînerait la disparition des deux. Tout comme les historiens , les ingénieurs soutiennent que « l’unité de la vallée est un fait que la nature nous impose ». Outre « les liens naturels, hydrauliques et économiques », l’unification de l’Égypte et du Soudan est étayée par les « liens inséparables » de « la langue, de la religion et du sang »7. De manière évidente, l’imagerie corporelle rendait visible la prétendue interdépendance des deux pays tout en validant les sous-entendus de supériorité raciale.
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Né et élevé à Khartoum, le premier président de l’Égypte, Muhammad Naguib, était à moitié soudanais. ↩
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Al-Sayyid Nasr, al-Wujud al-Misri fi Afriqya fi al-fatra min 1820 ila 1899 [La présence égyptienne en Afrique de 1820 à 1899], Dar al-Ma’arif, Le Caire, 1981, 13. Voir aussi ʻAbbās Muṣṭafá ʻAmmār, The Unity of the Nile Valley: Its Geographical Bases and Its Manifestations in History, Govt. Press, Le Caire, 1947. ↩
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Muḥammad Fuʼād Shukrī, Miṣr wa-al-siyādah ʻalá al-Sūdān [L’Égypte et sa souveraineté sur le Soudan], Dār al-Fikr al-ʻArabī, Le Caire, 1946 et Shukrī, al-Ḥukm al-Miṣrī fī al-Sūdān 1820-1885 [La domination égyptienne au Soudan, 1820-1885], Dār al-Fikr al-ʻArabī, Le Caire, 1947. ↩↩
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Gabriel R. Warburg, « The Turco-Egyptian Sudan: A Recent Historiographical Controversy », Welt Des Islams 31, no. 2, 1991 : 201. ↩
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S. Gawdat Bey, « Introduction to the Series of Lectures Given by Egyptian Experts on the Unity of the Nile Valley », Majallat al-Muhandisin [The Engineers Journal], 9-10. ↩
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Warburg, « The Turco-Egyptian Sudan », 200-202. Les membres du parti nationaliste, comme le médecin Ahmad Fu’ad, ont poussé la métaphore plus loin, appelant l’Égypte la « tête pensante » et le Soudan le « corps actif », le Nil constituant leur cœur commun. Fu’ad cité dans Anwar al-Jindi, A’lam wah ashab aqlam, Dar Nahdat Misr, Le Caire, c. 1966, 41. ↩
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H.E. Osman Muharram, « Summary of the Speech Delivered by Osman Muharram Pasha on the Unity of the Nile Valley », Majallat al-Muhandisīn, 25. ↩
Les métaphores voyagent. Jusque dans les années 1980, les historiens en Égypte ont continué à puiser dans ces images organiques. En 1988, l’historien Abd al-Azim Ramadan commence le deuxième chapitre de son livre sur la colonisation égyptienne du Soudan par la citation suivante :
Si le lecteur examine une carte du système nilotique, il ne peut manquer d’être frappé par sa ressemblance avec un palmier. Au sommet, la zone verte du delta se déploie comme de gracieuses feuilles et frondaisons. La tige est peut-être un peu tordue, puisque le Nil décrit une vaste courbe en traversant les déserts. Au sud de Khartoum, la ressemblance est à nouveau parfaite, les racines de l’arbre commencent à s’étendre profondément dans le Soudan. Je ne peux imaginer de meilleure illustration du lien intime entre l’Égypte et ses provinces du sud.1
Ramadan précise que le texte susmentionné n’est pas une citation tirée « d’un écrivain patriotique égyptien ou soudanais, mais plutôt les mots d’un homme d’État colonial […] à une époque où les Britanniques régnaient sur le Soudan au nom de l’Égypte ». En effet, la métaphore de la mobilité n’est autre que celle de Churchill2. Outre ses contours orientalistes, le palmier, traduit dans les mots élégants de Churchill et par les phrases en arabe tout aussi lyriques de Ramadan, a été une image si efficace qu’elle est devenue la base de l’argument en faveur de l’hégémonie égyptienne sur le Nil, et ce, même après le départ des Britanniques. La source de cette métaphore apparemment inoffensive est une invention coloniale qui a parcouru un demi-siècle sous la plume d’historiens égyptiens d’influence.3
Enraciné dans le sol du Soudan, ce palmier colonial n’avait apparemment pas de racines en Éthiopie, comme s’il ne pleuvait pas dans les hauts plateaux éthiopiens qui contribuent à plus de 85 % du débit fluvial. L’image déformée de l’arbre d’une continuité égypto-soudanaise avec l’Éthiopie en marge a laissé un héritage dans les accords postcoloniaux sur la répartition des eaux du Nil. En 1959, un traité anglo-égyptien attribuait 66 % des eaux du fleuve à l’Égypte, 22 % au Soudan et le reste à l’évaporation, négligeant les droits relatifs à l’eau des pays en amont traversés par le fleuve, dont l’Éthiopie.
C’est ce trope botanique — transplanté dans le symbole plus délicat, innocent et ancestral de la fleur de lotus — qui atterrit sur les bureaux des élèves du primaire dans les années 1960. Bien que semblant promouvoir des idées d’interdépendance et de collaboration, la figure florale cultivait en fait une idéologie de domination égyptienne dans la vallée du Nil.
Retracer la manière dont nous avons hérité de métaphores telles que le palmier, le corps humain ou la fleur de lotus éclairent les conflits actuels non résolus autour du barrage de la Renaissance en Éthiopie, dont la construction a débuté en 2011. Accoutumée à bénéficier de la richesse du Nil grâce à des traités datant de l’ère coloniale, l’Égypte s’efforce de maintenir le statu quo. En rejetant cet héritage fondamentalement colonial, l’Éthiopie conçoit le barrage comme un remède au mépris de ses droits sur l’eau, qui perdure depuis des décennies. Le barrage rebute le palmier et menace de retenir les eaux qui le font vivre.
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ʻAbd al-ʻAẓīm Ramaḍān, Ukdhūbat al-istiʻmār al-Miṣrī lil-Sūdān [La fausseté de l’impérialisme égyptien au Soudan : une perspective historique], al-Hayʾah al-Miṣrīyah lil-Kitāb, Caire, 1988, 108-109. ↩
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Churchill et Rhodes, The River War, vol. II, 389-390. Le passage de Churchill lui-même développe la métaphore : « L’eau – source de vie du Delta - est puisée au Soudan et passe le long du canal du Nil, comme la sève remonte le long de la tige de l’arbre, pour former une belle récolte de fruits au sommet ». ↩
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Les historiens égyptiens ont repris la référence au palmier de Churchill hors de son contexte, sans citer son argumentaire. Churchill recourt à cette métaphore dans La Guerre du fleuve pour défendre la position de l’Angleterre contre les Français dans la lutte pour le contrôle de la vallée du Nil, dont l’évènement culminant a été la crise de Fachoda en 1898. ↩
Les métaphores persistent. Ce constat n’est nulle part plus évident que dans la rhétorique développementaliste de la fin du XXe siècle. Tout rapport d’une agence internationale de développement aborde son sujet en répétant la platitude d’Hérodote selon laquelle l’Égypte est un « don » du fleuve1. Au cœur d’un Sahara apparemment sans fin, le Nil représente une « ligne de vie », un miracle géographique dans un paysage autrement sec et sans vie2. Dans un article publié en 1991, Timothy Mitchell cite des rapports de la Banque mondiale truffés de tropes visuels qui décrivent le Nil comme « une oasis longiligne au milieu du désert »3. De même, un rapport de l’USAID [L’Agence des États-Unis pour le développement international] propose l’image d’un « étroit ruban de terre cultivée », si mince qu’il peut à peine contenir les populations qui le peuplent. Mitchell souligne que ces images réduisent la pénurie d’eau dans la vallée du Nil à un problème naturel, un accident géographique. À l’instar de nos ingénieurs nationalistes, les agences de développement s’appuient sur un discours d’expertise et de professionnalisme pour se démarquer de leur objet d’analyse imageable.
Tout au long du XXe siècle, les métaphores nilotiques ont occulté la lutte de longue date pour les droits sur l’eau dans la région, contribuant à naturaliser la supériorité raciale et à légitimer la domination coloniale. À mesure que le pouvoir passe d’une main à l’autre, les métaphores circulent avec lui – de l’appareil respiratoire colonial au corps postcolonial, du palmier nationaliste au ruban néocolonial. Elles ont également ramené le Nil à une échelle plus accessible, qui a facilité les actes de destruction – disloquer l’équipement, noyer un corps, déraciner un arbre. Après tout, ces objets étaient plus faciles à gérer que l’un des plus longs fleuves du monde. Par leur simplicité trompeuse, les métaphores liées au Nil ont occulté la géopolitique de la distribution de l’eau dans cette région. L’attention portée à ces métaphores révèlent nos présomptions sur ce paysage historique et nous aident à rompre avec les récits violents qu’elles véhiculent.
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Herodotus, The History, Livre II, trad. David Grene (Chicago: University of Chicago Press, 1987), 5 ↩
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Timothy Mitchell, « America’s Egypt: Discourse of the Development Industry », Middle East Report, no. 169, mars-avril 1991, 18-34. ↩
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États-Unis, ministère de l’agriculture, Egypt: Major Constraints to Increasing Agricultural Productivity, Rapport sur l’économie étrangère 120 (Washington, DC, 1976), cité dans Mitchell, 24. ↩
Traduction de l’anglais par Gauthier Lesturgie